César est l’un des artistes parmi les plus illustres mais aussi le plus méconnu de son temps. Remarqué, il l’est dès l’âge de 25 ans, lorsque, « monté » à Paris en 1944, il met au point sa technique des « fers soudés ». Méconnu, malgré une faconde méridionale et une manière d’exister en public il masquait un caractère complexe
Il n’est pas seulement l’homme, des « Compressions », des « Empreintes » ou des « Expansions », mais aussi presque un classique dont l’œuvre peuplée d’un bestiaire à figures humaines le rattache à l’idée des Maîtres anciens qu’il vénérait.
César avait rejoint en 1960 les » Nouveaux Réalistes, » Inventif, guidé par le seul matériau, il imprime son écriture métamorphosant à sa manière le langage et la pratique de la sculpture. Il revenait toujours aux techniques inventées lorsque, sans le sou, il soudait fragments et déchets de métal récupères avec comme étapes de création devenues mythiques : Le Poisson, La Vénus de Villetaneuse, La Ginette, toutes sculptures devenues à présent des icônes. Au final un rapport intime à la création, une praxis qui ne déléguait rien à la machine et qui ne résultait qu’à l’initiative de ses mains.
De ce mariage entre un faire artisanal et une pratique semi- industrielle César construit une dialectique et une méthode, que son ami Raymond Hains appelait des « chantiers », y revenant sans cesse, s’inventant des outils, poussant plus loin sa curiosité́. César, devant ses « Enveloppages » de feuilles de Plexiglas, ses « Championnes » faites de carcasses de voitures accidentées, devant sa « Suite Milanaise » de voitures neuves compressées et laquées, se nourrissait de ses expériences, les rejouant en autant d’exercices, guidé par une réflexion sur le langage de la sculpture.
Le Centre Georges Pompidou à organisé une rétrospective en 2017-2018 qui a redonné un éclairage mondial sur cet artiste majeur du XX ème siècle.
Le Centaure : l’œuvre la plus emblématique de César
Notre centaure en marbre travertin commandé par l’industriel Monégasque Michel Pastor à son ami César est de la même dimension que celui en bronze qui trône place Michel Debré́, dans le 6e arrondissement de Paris. Un autre exemplaire se trouve également sur la tombe de l’artiste au cimetière Montparnasse.
Cet être hybride dévoile les deux passions de César : l’une pour les chevaux, l’autre pour Picasso. À l’origine, pour célébrer, en 1983, le dixième anniversaire de la mort de ce dernier, le musée Picasso d’Antibes demande à des artistes de créer une œuvre en hommage au Maître espagnol. Hélas, par manque de fonds, la commande n’aboutit pas.
Le Ministère de la Culture lance alors le projet d’une commande publique. César peut ainsi se confronter à son Maître. Car le centaure et le minotaure sont deux répliques inversées de l’humain et de la bête. Si la tête du centaure est bien celle de César, un masque au-dessus reproduit le visage de Picasso. D’un geste, grâce à une tige orientable, le masque peut recouvrir le visage. Qui est qui ?
« Le marbre était trop cher, la vieille ferraille traînait partout, je suis devenu sculpteur parce que j’étais pauvre» se « lamente »-t-il . Il scie, soude, modèle des objets de la vie courante, sculpteur sorcier des métamorphoses, tout comme Picasso. Notre exemplaire en marbre est donc unique par sa taille et par sa matière.
À l’intérieur du corps, il cache une petite Statue de la Liberté́, et une colombe de la Paix s’apprête à prendre son envol sur la main gauche de l’animal fantastique. Pour rejoindre Picasso ?